Depuis plusieurs années, une terrible rumeur circule : sur l’île de La Réunion, certains pêcheurs utiliseraient des chiens vivants comme appâts pour capturer des requins. Cette affirmation choc, relayée notamment par la presse étrangère dès le milieu des années 2000, a provoqué une indignation mondiale. Mais quelle est réellement la vérité derrière ces accusations ?
Origines et ampleur du phénomène
Tout commence en 2003, avec la découverte d’un chien mutilé qui suscite immédiatement l’indignation et l’horreur. Deux ans plus tard, en 2005, une émission télévisée française met à nouveau le feu aux poudres en diffusant des images insoutenables. Très rapidement, la nouvelle traverse les frontières et enflamme l’opinion publique internationale. Pourtant, la réalité s’avère bien différente et moins dramatique que les médias ne l’ont initialement suggéré.
Selon un article publié dans la presse réunionnaise en 2006, l’utilisation des chiens comme appâts serait marginale et limitée à une poignée de pêcheurs amateurs, et non à une vaste pratique répandue chez les professionnels. Contrairement aux descriptions sensationnalistes initiales, les animaux employés comme appâts seraient en réalité des chiens morts, souvent récupérés après avoir été victimes d’accidents routiers, ou issus de la population importante de chiens errants de l’île, estimée à environ 150 000.
Ces animaux sans vie sont généralement attachés à des plateformes flottantes, des dispositifs appelés « pièges à requins », et non traînés vivants derrière des bateaux comme l’avaient rapporté certains médias étrangers.
Réactions officielles et condamnations judiciaires
Face à l’ampleur de la polémique, l’ambassade de France à Washington avait même été contrainte de publier une déclaration officielle pour apaiser les tensions. Dans cette réponse, elle reconnaissait la gravité du problème tout en insistant sur le caractère isolé et exceptionnel de ces actes, condamnés par la loi française depuis longtemps.
Les autorités réunionnaises, soumises au droit français et européen, avaient également réagi fermement. Des poursuites judiciaires ont ainsi été entamées contre les auteurs présumés de ces actes barbares. Un livreur et pêcheur amateur avait notamment été jugé en 2005 pour « cruauté envers les animaux » après avoir été accusé d’avoir utilisé un chien comme appât.
Mesures de prévention et d’application de la loi
La France, réputée pour posséder l’une des législations les plus sévères au monde en matière de protection animale, a immédiatement renforcé ses dispositifs légaux et ses contrôles. Le ministre français de l’Agriculture et de la Pêche de l’époque, Dominique Bussereau, avait ainsi adressé une communication à l’Assemblée nationale soulignant l’application stricte des lois existantes et annonçant des mesures complémentaires.
Parmi ces mesures figuraient l’obligation pour les vétérinaires de signaler toute blessure suspecte aux autorités compétentes et l’augmentation des contrôles effectués par la police maritime. Par ailleurs, une vaste campagne de stérilisation des animaux errants avait été mise en place dès 2001, afin de réduire significativement leur nombre sur l’île.
Une réalité loin du sensationnalisme
Si l’existence de cas isolés ne peut être niée, la réalité est bien loin de l’image sensationnaliste véhiculée initialement. Il n’existe aucune pratique traditionnelle ou généralisée consistant à employer des chiens vivants comme appâts à La Réunion. Les cas avérés restent exceptionnels, commis par des individus irresponsables rapidement sanctionnés par la justice.
Cette rumeur, largement amplifiée par des médias étrangers en quête de sensationnalisme, a provoqué un malentendu durable, entachant injustement l’image de l’île et de ses habitants. La majorité des Réunionnais condamne fermement ces actes, totalement étrangers aux traditions et valeurs locales.
Vigilance et responsabilité collective
Aujourd’hui encore, il est essentiel de rester vigilant et d’éviter les raccourcis médiatiques. La protection animale est une responsabilité collective qui demande des efforts constants en matière d’éducation et d’application rigoureuse des lois existantes.
Si le phénomène des chiens utilisés comme appâts pour requins existe bel et bien, il demeure rare, isolé et sévèrement puni. L’engagement ferme des autorités réunionnaises et françaises à lutter contre toute forme de cruauté animale permet de rassurer sur l’avenir, tout en rappelant la nécessité d’une vigilance permanente face aux dérives isolées de quelques individus irresponsables.